> L’ALGÉRIE AU PASSÉ LOINTAINDe Carthage à la Régence d’Alger
L’histoire de l’Algérie
ne débute pas en 1830 et le régime algérien actuel n’est pas le retour
à la Régence, après la fermeture de la parenthèse coloniale. Tout commence avec
Carthage dont le millénaire a imprégné les royaumes berbères dans tous
les domaines : la langue, l’économie, l’organisation de l’État, l’urbanisation,
les arts et les techniques, les coutumes et la religion, avec le dieu
principal Ba’al Hammon, version punique de l’Adonaï hébreu, les pratiques
religieuses, les temples et le clergé. Carthage détruite, son héritage
sera conservé par les cités puniques et les royaumes berbères de Jugurtha
et Massinissa. L’Afrique romaine
connut la prospérité et une intense urbanisation. À partir des Sévères,
l’Afrique affirme son identité berbère dans la vie sociale, politique,
municipale, militaire et religieuse avec la diffusion du culte de Saturne,
simple romanisation du Ba’al-Hammon/Adonaï. Le christianisme s’implanta
et prospéra avant d’être rejeté quand Augustin fit appel à l’administration
pour combattre le judaïsme, les hérésies, le paganisme, le donatisme
et les révoltes des circoncellions. L’occupation vandale
et byzantine fut éphémère et ce sont Koseila et la Kahena, les chefs
des tribus berbères christianisées et judaïsées, qui combattirent les
Arabes. L’islamisation et l’arabisation qui suivirent, ne furent acceptées
que remodelées pour s’intégrer dans le creuset berbère. Le Maghreb connut
une certaine « renaissance », mais après l’invasion hilalienne, la coupure
de la Méditerranée en deux blocs hostiles et la Reconquista d’Al-Andalus,
le Maghreb se fragmente. Menacée par les Espagnols, Alger fit appel
aux corsaires turcs, les frères Barberousse. La Régence d’Alger qu’ils
créèrent prospéra avec l’industrie de la course, sans jamais devenir
un État assurant les différentes fonctions régaliennes : l’administration,
l’économie, la monnaie, l’éducation et tous les services publics. Plaquée sur le pays
réel, la Régence disparut après la première bataille et c’est le monde
berbère arabisé ou non qui s’opposera à la conquête française. Il survivra
ensuite en s’adaptant pour resurgir, quand les Kabylies et les Aurès
devinrent les bastions de la révolution algérienne. L’Histoire n’est
pas finie. Jacques Simon
est né à Palat (Algérie) en 1933. Lycéen à Tiaret, Mascara et Alger,
puis étudiant à Paris (Lettres et Droit). Il participe en 1956 à la
création de l’Union Syndicale des Travailleurs Algériens (USTA) qui
sera soutenue par la Fédération de l’Éducation Nationale, la gauche
socialiste, A. Breton, A. Camus, E. Morin. Jacques Simon a dirigé plusieurs
journaux et revues (L’Étincelle, Tribune algérienne, Libre Algérie,
Cirta). Docteur en histoire, il préside le Centre de Recherche et d’Étude
sur l’Algérie contemporaine (CREAC). Illustration : Le Tombeau de la
Chrétienne. Mausolée royal de Maurétanie, situé à une soixantaine de
kilomètres à l’ouest d’Alger. Photo de : Michel-Georges Bernard. Collection « CREAC-Histoire
» dirigée par Jacques Simon.